PATRIMOINE DE DORNES

MADAME LEFEBVRE-LEMAIRE : LE PERSONNAGE

Madame Marie-Antoinette, Josephe Lemaire de Marne est née le 24 mars 1779 à Douai dans une famille de souche noble (fief nommé Marne) qui habite le sud du département de la Flandre Romane, plus précisément le département du Nord.

Maitre Auriol, qui fut son notaire et maire de Dornes, décrit notre personnage : « fortement constituée, de grande taille, assez forte et à l’allure fière, ayant le coeur haut et la tête droite. Elle avait l’aptitude à se trouver à l’aise dans un salon de parade, et pouvait également occuper un tabouret à la cour. »

Elle se marie le 5ème jour complémentaire An VI (21/09/1798) à Douai avec Mathieu-Antoine-Joseph LEFEBVRE, receveur général de la Nièvre. Ils achètent le Château de la Rocherie, au lieu-dit Les Vernuches à Varennes les Nevers (58) où le couple mène une vie mondaine. Mr LEFEBVRE décède dans son château le 11 novembre 1837 et son épouse le 20 juillet 1863 au château de Dornes.

Un tableau ornant la chapelle du Bon Pasteur représente Mme Lefebvre-Lemaire (ci-dessous un extrait).

C’est à partir de 1822 qu’ils sont connus des dornois : le 24/09/1822 ils achètent la terre de Dornes où ils séjournent régulièrement. En 1829, Mme Lefebvre fait l’acquisition d’un hôtel rue de la sonnerie à Nevers. Dotée d’un fort caractère, pouvant être irascible, elle était bienveillante, avait un coeur charitable en faveur des malheureux.

Une citation deAuriol caractérise bien le personnage : « nonobstant une âme ardente, elle s’apaisait vite et regrettait ses emportements ; c’était la foudre grondante par bonds précipités,…., suivi bientôt du sourire de l’arc-en-ciel ». Malgré son tempérament tempétueux, « sur le plan social elle a fait beaucoup de bien, et pouvait également faire beaucoup de mal ».

Suite à une longue hospitalisation de plusieurs mois, suivie d'une très longue convalescence, elle nourrit le vœu d’employer le reste de ses jours aux bonnes œuvres. Elle s’occupe des pauvres de Varennes, les considérant comme sa famille. D’ailleurs, elle crée un hospice pour la vieillesse indigente et une école d’instruction pour jeunes filles, placés sous la direction des sœurs de la Charité de Nevers, Elle s’associe à toutes les œuvres de bienfaisance de la ville en faveur des communautés religieuses et hospices.

Marie-Antoinette Lefebvre-Lemaire, de par son caractère « explosif /irascible», sa stature imposante, et le pouvoir qu’elle exerce sur tout, s’attire la rancoeur des habitants de Varennes, En effet, elle obtient de l’évêque la mutation du curé de la paroisse au motif qu’il n’a pas adhéré à son exigence : « le jour de la Fête Dieu, sans aviser personne, elle fait dresser un reposoir de station en face de sa villa, et au moment de la procession, elle fait prévenir le curé, de se rendre à Vernuches ». Celui-ci donne sa réponse : « ...par un soleil ardent, il serait imprudent de conduire, tête nue, toute une population à deux kilomètres du clocher », parce que « la température s’y opposait ». De plus, elle expulse les indigents hébergés dans l’établissement qu’elle avait aménagé pour les accueillir. C’est alors qu’elle décide de quitter Vernuches et de vendre l’établissement à l’évêque. Elle s’oriente alors vers Dornes avec l’idée de venir habiter le château et, poussée par ses convictions religieuses, de fonder un établissement de bienfaisance.

Le 11 novembre 1837, son époux décède lui laissant une très honorable fortune, avec l’intégralité de l’usufruit. L’ensemble des propriétés et valeurs mobilières représentaient au moins 600 000 francs déduction faite des droits par moitié des héritiers indirects. Marie-Antoinette Lefebvre séjourne de plus en plus longtemps à Dornes. Avec une telle fortune et ses profondes convictions « religieuses et bienfaitrices » elle finit par déclarer son intention d’ouvrir un établissement hospitalier «destiné au refuge de la vieillesse et à l’instruction des jeunes filles ». Cette idée est accueillie avec « enthousiasme par les mères de familles ». Elle entreprend donc de nombreuses « démarches » pour réaliser son projet d'une grande envergure (achats ou échanges de propriétés, bâtiments ou terrains). Le projet est d'abord fort bien accueilli, Dornes étant une commune sous-équipée, mal desservie par les voies de communication avec peu de moyens financiers. Mais les obstacles causés par son caractère et son obstination sans limite, les heurts avec la municipalité et les habitants furent nombreux. Elle voulait tout régir elle-même, pensant qu'elle avait tous les « droits ». Pour améliorer les relations la municipalité compose avec elle. Elle dépense sans compter pour réaliser son projet sur deux ans (500 000 francs).

Elle fait édifier le « Bon Pasteur » et le « Sacré-Cœur ». Ils se situent de part d’autre de l’église. Ces bâtiments en brique, encore utilisés actuellement, sont respectivement la salle des Associations (ancienne chapelle) jouxtant la maison d’habitation au Nord et l’école maternelle avec la garderie

Forte de sa générosité, par « un acte notarié de 1862 reçu par Guillaume Victor Auriol, Mme Lefebvre-Lemaire fait don à la commune de Dornes « du Bon Pasteur » et du « Sacré Coeur » ainsi qu’un capital de 96 000 francs à la condition expresse de poursuivre ses œuvres. » (MM Lacoste).

Nous percevons Mme Lefebvre-Lemaire, comme une bienfaitrice, telle que M° Auriol la décrit dans son manuscrit :

C'était une grande Dame au « Tempérament de fer, une âme de feu, dont les emportements la dominaient de toute la hauteur de son ancienne splendeur mondaine ; c'était un cœur d'or. »

Nous avons fait le choix de nous limiter à dépeindre la personnalité de madame Lefebvre, personnage très autoritaire et à la fois généreux.

Sources : manuscrit de M° Victor Auriol « Vie de Madame Lefebvre - Dornes 1863 » 

Notes de MM Lacoste - Patrimoine de Dornes

Françoise Lagarde – Claire Pruneau